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Contrat de franchise : les critères à démontrer pour que l’absence de renouvellement du contrat de franchise dégénère en abus et les conditions de validité des clauses de non réaffiliation

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Un arrêt longuement motivé et circonstancié de la Cour d’Appel de Versailles en date du 24 janvier 2017 (CA de VERSAILLES , 12e ch., sect. 2, 24/01/2017, n°15/00071) a été l’occasion de rappeler les principes régissant l’extinction du contrat de franchise et la précarité des franchisés.

Franchisés ayez conscience de votre précarité au moment de la conclusion du contrat de franchise.
Tel pourrait être la mise en garde à adresser aux franchisés qui souhaitent se lancer dans l’aventure de la franchise.
De façon schématique, le contrat de franchise est un contrat commercial au titre duquel un franchiseur transmet un savoir-faire et des droits de propriété industrielle à un franchisé afin que ce dernier puisse développer son commerce. Adjuvant incontestable pour le développement de la clientèle d’une entreprise, le franchisé – certes assisté par le franchiseur – n’en demeure pas moins un commerçant indépendant qui supporte donc seul les risques de son exploitation.
Pourtant, compte tenu de l’attractivité de l’enseigne de la franchise choisie, la précarité du franchisé se révèle d’elle-même – le plus souvent – au moment de l’extinction du contrat de franchise.
L’arrêt de la CA de Versailles en constitue une illustration.
Concrètement plusieurs franchisés d’un réseau de transaction immobilière avaient conclu un contrat de franchise pendant 5 ans. Deux années avant la fin du contrat de franchise, le franchiseur a notifié son souhait de ne pas renouveler le contrat de franchise.
Les franchisés en ont pris acte et ont dû trouver une solution de repli : se réaffilier auprès d’un autre réseau de franchise concurrent.
Un contentieux a été engagé. Les franchisés demandent la reconnaissance de l’abus de ne pas renouveler le contrat tandis que le franchiseur souhaite engager la responsabilité de son ancien franchisé pour violation de la clause de non réaffiliation prévue au contrat.

Deux questions étaient donc posées à la juridiction : dans quelles circonstances le droit de ne pas renouveler un contrat à durée déterminée peut il dégénérer en abus ? quelles sont les conditions de validité d’une clause de non réaffiliation?

1. Sur l’absence de droit au renouvellement d’un contrat à durée déterminée et l’abus
Par principe, le franchisé doit retenir que quelle que soit l’importance économique et financière du contrat de franchise pour l’exploitation de son commerce la règle juridique est invariable : il n’existe pas de droit au renouvellement d’un contrat à durée déterminée.
Le contrat à durée déterminée a vocation à s’éteindre à l’échéance de son terme.
Le franchiseur, comme n’importe quel autre partenaire commercial, n’est pas tenu de renouveler un contrat à durée déterminée pourvu que les circonstances dans lesquelles il ne renouvelle pas ce contrat ne sont pas fautives.
En pratique, la loi et la jurisprudence vérifient deux éléments : 1/  l’absence de brutalité dans la rupture de la relation commerciale (ce qui implique le respect d’un préavis raisonnable) et 2/ l’absence d’abus dans les conditions de la rupture.
En l’absence de brutalité (un long préavis ayant été respecté), seule la question de l’abus était mise en lumière.
En l’espèce le franchisé arguait que le franchiseur avait violé plusieurs obligations contractuelles. Par exemple, en manquant à son devoir d’assistance, en ne mettant pas à jour régulièrement son savoir-faire, en favorisant les succursales et membres intégrés de son réseau, en laissant croire dans la plaquette de présentation initiale que l’activité comprise dans le réseau de franchise allait très rapidement être élargie à la gestion locative etc.
Cependant, le franchisé a été confronté, en premier lieu, à une difficulté probatoire de ses propres allégations – comme cela est souvent le cas dans ce type de contentieux.
Aussi et surtout, la Cour rappelle qu’il n’existe aucun droit au renouvellement d’un contrat de franchise à durée déterminée de sorte que l’abus du droit de non renouvellement d’un tel contrat ne peut procéder que d’une intention de nuire (…) aucun abus ne peut se déduire de prétendus manquements contractuels ou déloyautés à la tête du réseau dans l’exécution du contrat litigieux.
Se montrant didactique, elle rappelle que de simples inexécutions contractuelles ne sauraient suffire à faire dégénérer l’absence de renouvellement d’un contrat à durée déterminée en abus.
En réalité, pour que le non renouvellement dégénère en abus il faut démontrer une intention de nuire, c’est-à-dire, en pratique, que le franchiseur ait entretenu le franchisé dans l’illusion que le renouvellement était acquis (par exemple en demandant des investissements, en s’engageant à augmenter l’exclusivité territorialité ou l’étendue de l’activité concernée par le contrat de franchise).

En pratique, il est donc difficile de faire constater par une Juridiction que l’absence de renouvellement d’un contrat de franchise à durée déterminée a dégénéré en abus.

2. La validité des clauses de non réaffiliation

Bien plus, une fois que le contrat de franchise est éteint, il n’est pas rare que les anciens franchiseurs imposent une obligation de non réaffiliation (clause voisine de la clause de non concurrence) par laquelle le franchisé s’interdit de s’affilier à un réseau de franchise ayant une activité identique ou similaire.
A l’image de la clause de non concurrence, cette clause de non ré affiliation a sa validité conditionnée.
La Cour d’Appel de Versailles a rappelé qu’outre le fait d’être limitée dans le temps et dans l’espace ; une telle clause doit être justifiée « par la protection des avantages concurrentiels offerts par le réseau et est censée protéger celui-ci, notamment contre la divulgation d’un savoir-faire ou de droit de propriété industrielle appartenant au réseau ou encore préserver l’image de marque du réseau ».
En l’espèce et contrairement à ce qu’avait jugé le Tribunal de Commerce la Cour d’Appel a validé la clause de non ré affiliation suivante :
« pendant une année à compter du retrait, de toutes les spécificités du concept X, le franchisé ne pourra directement ou indirectement s’affilier, adhérer ou participer d’une manière quelconque à un groupement ayant une activité proche ou similaire à celle du franchiseur pour exploiter ladite activité dans les locaux faisant l’objet des présentes stipulations contractuelles ».
Cette clause limitée à un an et aux locaux d’exploitation a été validée en ce qu’elle « reste légitime puisque, contrairement à ce qu’ont estimé les premiers juges, le réseau qu’elle vise à protéger concerne non seulement les équipes franchisées mais également, les succursales et cabinets d’indépendants à l’enseigne si bien que l’application des article « secret » et « effet d’extinction du contrat » du contrat litigieux est d’évidence insuffisante à garantir la protection recherchée ».

En conséquence, il sera conseillé aux franchisés souhaitant intégrer un réseau de franchise de se faire accompagner lors de la négociation du contrat de franchise afin d’être assisté dès les premiers pourparlers et, à tout le moins, de s’engager en parfaite connaissance des risques liés aux clauses ainsi stipulées.
A minima, dès la rupture ou l’absence de renouvellement d’un contrat de franchise, le franchisé devrait consulter un Avocat en droit des affaires qui sera à même de le conseiller et de l’assister pour gérer tant la fin du contrat de franchise que la constitution de sa nouvelle entreprise / la restructuration de son activité, et la gestion des risques liés à ce contrat commercial.

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