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Nouveau dispositif en matière de confidentialité et de secret des affaires.

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Le capital intellectuel est un élément essentiel de la compétitivité d’une entreprise pour faire face au marché actuel.

Pour pouvoir innover, les entreprises investissent dans la recherche et le développement. Elles peuvent également bénéficier d’un savoir-faire ou de connaissances économiques, financières, commerciales qui font le succès de leur entreprise.

Outre la protection par des titres de propriété industrielle lorsque cela est possible (brevet par exemple), une stratégie efficace peut être le secret sur ces éléments phares de l’entreprise.

Ainsi, il est devenu primordial pour les entreprises de pouvoir protéger de manière efficace le  secret de leurs affaires.

Pour ce faire, l’état actuel de notre droit met à disposition certaines actions quant à la protection de ces secrets d’affaires.

Quels dispositifs existent pour garantir la confidentialité, secret des informations capitales ?

Outre le fait de pratiquement fragmenter les connaissances, la Loi et le contrat peuvent permettre d’assurer une protection.

  • Le code pénal

Ainsi, au plan pénal, le secret professionnel visé par l’article 226-13 du Code pénal comme la révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire est sanctionné pénalement d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Cependant, s’agissant d’une infraction pénale, les Magistrats veilleront à ce que tous les critères légaux soient réunis pour entrer en voie de condamnation. Rien d’aisé lorsque la personne qui viole ce secret n’est pas liée par le secret du fait de sa profession (comme un Avocat par exemple).

  • Le droit du travail

Le Code du travail n’est pas sans reste puisque le secret de fabrique bénéficie d’une protection prévue par l’article L. 1227-1 de ce code. Cet article dispose notamment que :

« Le fait pour un directeur ou un salarié de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrication est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros.

La juridiction peut également prononcer, à titre de peine complémentaire, pour une durée de cinq ans au plus, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille prévue par l’article 131-26 du code pénal. »

A nouveau, la sanction de cette violation supposera de réunir les critères légaux requis (un salarié ou un directeur)

Le droit commun de la responsabilité civile

La responsabilité civile délictuelle peut être également engagée, cela notamment au visa l’article 1112 du code civil qui énonce que :

« L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi. »

Et de l’article 1112-2 du même Code qui énonce également que :

« Celui qui utilise ou divulgue sans autorisation une information confidentielle obtenue à l’occasion des négociations engage sa responsabilité dans les conditions du droit commun. »

Ainsi, une partie peut être sanctionnée en cas de divulgation ou d’utilisation non autorisée d’une information confidentielle obtenue lors des négociations.

Dans certaines hypothèses, cela se traduira également par l’action en concurrence déloyale quand toutes ses conditions sont réunies. Pour mémoire, le fondement de l’action repose sur les principes de la responsabilité délictuelle de droit commun.

Le champ d’application de ce texte est beaucoup plus large. Toutefois, il supposera la réunion des trois conditions cumulatives nécessaires à l’engagement de la responsabilité d’un individu :

  • Une faute ;
  • Un préjudice ;
  • Un lien de causalité.

 

Les preuves requises dans le cadre du contentieux concernant les deux derniers critères pourraient être délicates à rapporter. Surtout, ces preuves seront soumises à l’appréciation souveraine du juge. 

Un Avocat spécialisé pourra assurément vous accompagner sur la stratégie contentieuse.

 

  • Le contrat

Par ailleurs, il ne faut pas négliger la force contractuelle. L’article 1103 du Code civil, énonçant que « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits », peut également avoir vocation à s’appliquer afin de sanctionner une divulgation d’informations non autorisée contractuellement.

Lorsque le contrat est rédigé par un professionnel du droit, celui-ci ne manquera pas de prévoir une clause pénale, c’est-à-dire une clause qui permettra aux contractants d’évaluer et cela de manière forfaitaire et par avance les dommages-intérêts qui pourront être dus par le débiteur en cas d’inexécution du contrat.

Ainsi, tout manquement pourra être sanctionné par une clause pénale. Pour cela, le conseil et l’expertise d’un avocat est recommandé. Notre cabinet se tient à votre disposition pour vous accompagner dans la rédaction de ce type de clauses complexes.

Il s’agira sans nul doute de la meilleure des protections !

Conclusion partielle : il existe divers dispositifs permettant de protéger les innovations que l’on souhaite garder secrètes.

Pour autant le secret des affaires n’était pas protégé entant que tel.

Face à ce vide juridique, on ne pouvait que se réjouir de l’intervention européenne et de l’entrée en vigueur de la directive (UE) 2016/943 du 8 juin 2016 (JOUE L157 du 15 juin 2016). Une directive qui enfin vise expressément la protection du secret des affaires en instaurant un cadre juridique européen.

La directive devait être transposée dans les pays européens au plus tard le 8 juin 2018 (article 19 de la directive). En France, le 21 juin 2018, le Sénat a adopté par scrutin public le texte de proposition de loi relative à la protection du secret des affaires.

Le 26 juin 2018, plusieurs sénateurs et députés ont saisi le Conseil Constitutionnel de la loi relative à la protection du secret des affaires. Nous ne pouvons, dès lors, pas encore complètement la manière dont sera transposée cette directive. Il semblerait, toutefois, que cette transposition devrait être relativement fidèle à la directive européenne.

Face à l’imminence de sa transposition, il nous semble opportun de recenser ses nouveautés et clarifications.

  1. Le point phare de cette directive : la définition tant attendue du secret des affaires.

En effet, l’article 2 de la directive donne une définition pour le moins claire puisqu’elle reprend les conditions déjà prévues à l’article 39 de l’accord sur les ADPIC.

Sont donc considérées comme « secret d’affaires », les informations qui :

 Sont secrètes en ce sens que, dans leur globalité ou dans la configuration et l’assemblage exacts de leurs éléments, elles ne sont pas généralement connues des personnes appartenant aux milieux qui s’occupent normalement du genre d’informations en question, ou ne leur sont pas aisément accessibles,

  • Ont une valeur commerciale parce qu’elles sont secrètes,
  • Ont fait l’objet, de la part de la personne qui en a le contrôle de façon licite, de dispositions raisonnables, compte tenu des circonstances, destinées à les garder secrètes 

 Les articles 3, 4 et 5 de la directive visent, quant à eux, la licéité des atteintes portées au secret des affaires.

Puisque l’article 3 vise les atteintes jugées par la directive licites. En effet, cet article énonce que l’obtention d’un secret d’affaires est licite :

  • Lorsque le secret d’affaires est obtenu notamment par une découverte ou une création indépendante. Cela est également possible par observation, démontage du produit ou objet mais il faut qu’il ait été mis à disposition du public ou que la personne l’ait obtenu de manière licite notamment en étant pas lié par une obligation juridiquement valide de limiter l’obtention du secret d’affaires.
  • Lorsque l’obtention, l’utilisation ou la divulgation d’un secret d’affaires est requise ou autorisée par le droit de l’Union ou le droit national.

A contrario l’article 4 détermine les atteintes illicites au secret d’affaires.

Ainsi, l’obtention d’un secret d’affaires sans le consentement du détenteur du secret d’affaires est considérée comme illicite lorsque :

Elle est réalisée notamment par le biais :

  • D’un accès non autorisé à tout document, objet, fichiers électroniques ou d’une appropriation ou copie non autorisée de ces éléments. Il faut que le détenteur du secret d’affaires contrôle de manière licite et que ces éléments contiennent ledit secret d’affaires ou tout du moins permettent de le déduire ;
  • De comportements qui peuvent être, au vu des circonstances, considérés comme contraire aux usages honnêtes en matière commerciales.

Elle est réalisée, sans le consentement du détenteur du secret d’affaires, par une personne dont il est constaté que :

  • Elle a obtenu le secret d’affaire de façon illicite ;
  • Elle agit en violation d’un accord de confidentialité ou obligations de ne pas divulguer le dit secret d’affaires ;
  • Elle agit en violation d’une obligation contractuelle ou autre obligation de limiter l’utilisation du secret d’affaires.

Au moment de l’obtention, l’utilisation ou de la divulgation du secret d’affaires, une personne savait ou, aurait dû savoir que ledit secret d’affaires avait été obtenu directement ou indirectement d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite.

Egalement, la production, l’offre ou la mise sur le marché, ou l’importation, l’exportation ou le stockage à ces fins de biens en infractions sont aussi considérés comme une utilisation illicite d’un secret d’affaires quand la personne qui exerce ces activités savait ou, eu égard aux circonstances, aurait dû savoir que le secret d’affaires était utilisé de façon illicite.

Règles sans exceptions ne valent, l’article 5 énonce les dérogations possibles que les Etats devront respecter lors de la transposition notamment lorsque l’atteinte résulte de la protection d’un « intérêt légitime » reconnu par le droit de l’Union ou le droit national.

Il est d’ores et déjà souhaitable, pour une meilleure effectivité du droit, que cette notion soit reprécisée en interne au vu de sa généralité.

III. l’obligation générale à la charge des Etats membres posée par l’article 6 ne pourra que plaire aux entreprises et notamment aux PME. En effet, cet article soumet une mise en place de procédures et réparations qui devront être :

  • justes
  • équitables
  • effectives et dissuasives
  • de moindre coût

Pour l’heure, la transposition française s’orienterait vers des dispositifs relativement similaires à ceux existant en droit de la propriété intellectuelle (saisine en référé ou sur requête, provision sur dommages et intérêts, dommages et intérêts calculé de manière dissuasive et très similaires au contentieux de contrefaçon.)

Attention, l’article 8 de la directive laisse le soin aux Etats membres de fixer le délai de prescription de ces actions. Toutefois, le délai ne pourra pas excéder six ans ! En France, et conformément à la prescription de droit commun, la durée de la prescription devrait être de 5 ans.

La directive s’est également assurée de protéger la confidentialité des secrets d’affaires au cours des procédures judiciaires.

Cette protection se fera notamment par le biais d’une obligation de confidentialité qui sera imposée aux différents acteurs intervenant dans la procédure. Cette obligation de confidentialité pourra perdurer après la procédure si la définition du secret d’affaire donnée par la directive trouve encore à s’appliquer.

Cependant, pour qu’il y ait obligation de confidentialité, celle-ci doit émaner d’une des parties qui devra motivée sa demande devant le juge. Ainsi, seul le juge aura compétence pour qualifier ou non les secrets d’affaires de confidentiels.

A ce titre, la transposition française envisage la mise en place de plusieurs gardes de fous complémentaires (limitation de la publicité des débats dans le cadre des contentieux voire limitation des pièces auxquelles les parties auront accès/ pourront divulguer, limitation des jugements publiés etc.)

Avant qu’une procédure soit engagée, les articles 10 et 11 de la directive permettent la mise en place de mesures provisoires et conservatoires afin de prévenir ou faire cesser une atteinte au secret d’affaires.

Pour cela, la directive laisse aux autorités judiciaires la possibilité d’ordonner toute interdiction ou cessation provisoire de l’utilisation du secret d’affaires. Il s’agit de dispositifs similaires à ceux existant en contrefaçon de marques par exemple.

Attention, la directive prévoit que les effets de ces mesures seront éphémères. Ainsi, si aucune procédure au fond n’est engagée après l’octroi de ces mesures, passé un certain délai celle-ci cesseront purement et simplement de produire leurs effets.

l’article 14 de la directive prévoit la condamnation du contrevenant à des dommages et intérêts qui permettront de réparer le préjudice subi par le détenteur de secrets d’affaires.

La détermination des dommages et intérêts pourra se faire selon deux possibilités : soit en prenant en compte les facteurs économiques et moraux, soit en prenant en compte un montant fixé forfaitairement comme, par exemple, le montant des redevances qui auraient été dues si une autorisation entre le contrevenant et le détenteur avait existée.

Par ailleurs, indépendamment de l’indemnisation du détenteur du secret d’affaires par l’octroi de dommages et intérêts, les articles 12 et 13 de la directive prévoient la possibilité aux autorités judiciaires d’assortir leurs décisions d’injonctions et mesures correctives.

Ainsi, selon l’article 12, lorsqu’une décision judiciaire rendu au fond constate qu’il y a eu obtention, utilisation ou divulgation illicite d’un secret d’affaires, les autorités judiciaires compétentes pourront, à la demande du demandeur, ordonner à l’encontre du contrevenant notamment la cession ou l’interdiction de l’utilisation ou de la divulgation du secret d’affaires ou demander l’interdiction de produire, d’offrir, de mettre sur le marché ou d’utiliser des produits en infraction, ou d’importer d’exporter ou de stocker des produits en infraction à ces fins.

Enfin, l’article 15 prévoit la possibilité pour les juridictions nationales d’ordonner la diffusion par publication de la décision rendue.

Assurément le Législateur européen se sera fortement inspiré du droit de la propriété intellectuelle.

EN CONCLUSION, cette directive est indéniablement porteuse d’espoir quant à l’évolution de la protection du secret d’affaires puisqu’elle permet aux entreprises un certain nombre d’actions afin de se protéger du vol ou de la divulgation de leurs secrets d’affaires.

 L’entrée en vigueur de ces dispositions est très attendue, ne serait-ce que dans le cadre des contentieux en concurrence déloyale.

 Voici un nouvel outil qui devra être éprouvé par les Avocats experts dans ce type de contentieux mais qui pourrait être appréciable.

En tant que de besoin, le Cabinet étant expert en droit commercial, pourra juger de l’opportunité d’user de cette nouvelle arme dans le cadre d’une stratégie contentieuse en concurrence déloyale.

Aussi et surtout, n’hésitez pas à vous faire accompagner en amont pour trouver la meilleure stratégie de protection de vos innovations.

L’anticipation permet souvent d’éviter le contentieux ou de le gagner.

 

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